La Circassienne de Guillemette de Sairigné, Robert Laffont
La journaliste Gillemette de Sairigné nous livre dans son dernier ouvrage "La Circassienne" la biographie d'une des dernières femmes d'épopée du XXème siècle, Leila du Luart. Née en 1898 à Saint-Pétersbourg, fille du général Hagodokoff, prince du Caucase du Nord, gouverneur militaire et commandant en chef des forces impériales en Extrême-Orient, elle sera très tôt confrontée aux dures lois de la guerre, des batailles aux frontières de la Chine. Elle connaîtra la vie sauvage en Mandchourie comme les fastes de la cour des Romanov, à Saint-Pétersbourg.
Dès l'âge de 17 ans, elle est infirmière pour l'armée russe. Deux ans plus tard, elle épouse un officier de la Garde Impériale dont elle a un fils. Le couple devra ensuite fuir la Russie qui connaît les heures sanglantes de la Révolution de 1917. Ils se réfugieront à Shangaï, elle perdra son fils unique, divorcera et décidera de quitter la Chine pour s'exiler en France.
Dotée d'une beauté hors du commun, Coco Chanel la remarque et l'engage comme mannequin. Elle rencontre en 1934 Ladislas du Luart qui appartient à une très ancienne famille de la noblesse sarthoise, il l'épouse, elle devient Leila, Comtesse du Luart.
La Guerre d'Espagne éclate et Leila s'engage alors dans l'assistance aux blessés de guerre. Elle met alors en place une formation chirurgicale mobile pour venir en aide aux unités combattantes de la Légion étrangère. Elle va sur tous les fronts, guerre d'Espagne, camps d'internement de Vichy en Algérie en 1941, campagnes de Tunisie, d'Italie, de France. En 1943, alors que le 1 Régiment Etranger de cavalerie se trouve à Rabat, elle est nommée marraine du régiment, légionnaire de première classe, Brigadier, Brigadier-Chef en 1944. En 1945, elle franchit le Rhin parmi les premières et défile à Paris le 14 Juillet.
Destinée extraordinaire de cette femme qui a été liée à tous les événements tragiques du siècle dernier, Leila est une des dernières héroïnes du XXème siècle. En pratiquant la chirurgie lourde en zone de combats, elle va révolutionner l'assistance aux blessés et permettre de diminuer considérablement le nombre des victimes. L'auteur nous raconte une histoire d'amour, l'amour d'une femme pour ce régiment de Légion, ces soldats qui comme elle, avaient tout perdu, jusqu'à l'identité, avaient connu la douleur de l'exil, c’est un amour auquel elle restera fidèle jusqu'à la fin de ses jours puisque seulement deux ans avant sa mort, alors âgée de 85 ans, elle participait encore à la revue du Régiment Etranger de cavalerie à Orange. Magnifique hommage d'une femme qui a sublimé toutes les épreuves que la vie semait sur son parcours, une femme de courage qui a toujours refusé le statut de victime, une femme qui aimait les hommes, la vie, une femme qui avait banni de son vocabulaire l'expression "sexe faible".
Commandeur de la Légion d’honneur, grand officier de l’ordre national du Mérite, elle totalise six citations, dont trois à l’ordre de l’armée. Elle décède le 21 janvier 1985,ses obsèques se déroulent en l'église Saint-Louis-des-Invalides, puis elle est inhumée au carré Légion du cimetière russe de Sainte-Geneviève-des-Bois. Une stèle à sa mémoire est inaugurée le 21 janvier 1989, au sein du quartier Labouche, à Orange.