Le voyage de cent pas de Richard C. Morais, Ed. Calmann-Lévy
Paru le 02/2011,309 pages
Hassan Haji, jeune musulman de Bombay, est né au milieu des effluves épicées de la cuisine indienne, les aromates, le curry, l’anis étoilé, la cardamone. Son grand-père a commencé en livrant à vélo des plats cuisinés dans les rues de Bombay, et son père Abbas, ambitieux personnage haut en couleurs, œuvre dans la cuisine de son grand restaurant, au milieu de sa tribu bruyante et admirative.
Tout semble lui réussir, il prospère vite, acquiert des hectares de terrains dans le centre de Bombay, une ville en pleine mutation, qui se modernise, se redresse, où le mètre carré est l’un des plus chers au monde. La famille Haji est en voie de devenir l’une des plus riches de la ville, mais ce bonheur est fauché en quelques minutes, lorsque des fanatiques hindous incendient le restaurant des Haji, dans lequel la mère d’Hassan périt brûlée vive. Abbas ne s’en remet pas, il décide alors de tout vendre et de quitter l’Inde pour immigrer en Europe.
Toute la famille part alors s’installer dans le quartier de Southall, près de l’aéroport d’Heathrow à Londres, un quartier peuplé pour la majeure partie d’Indiens et de Pakistanais. Abbas se remet au travail comme un forcené, il veut de nouveau ouvrir un restaurant, mais il déprime. Il lui faut bouger, il entraîne alors toute sa famille dans un cortège de Mercedes, pour une virée dans les pays d’Europe, à la découverte des spécialités culinaires. Ils achèvent leur périple en France, dans le Jura à Lumière où Abbas tombe en amour pour une grande maison, il l’achète pour y installer le restaurant indien de ses rêves, la Maison Mumbai. La roue semble avoir tourné pour la tribu Haji, mais c’était sans compter leur voisine, la revêche Madame Mallory et son célèbre restaurant Le Saule Pleureur, deux étoiles au Michelin, qui s’insurge contre le bruit, l’odeur de friture, de cuisine exotique qui parfume toute la rue et heurte ses narines délicates. La guerre est déclarée entre les deux restaurants, chacun y va de coups bas, d’insultes et de dénonciations. Mais un jour, elle découvre le don d’Hassan, ce don particulier, « ce petit quelque chose qu’on ne rencontre qu’une fois par génération. C’est un chef né. Un artiste ». Elle n’aura alors de cesse de vouloir le débaucher pour l’embaucher chez elle. Elle n’a alors plus qu’un souhait, un désir, celui de faire du jeune Hassan, un grand chef de la grande cuisine traditionnelle française. Devant le refus d’Abbas, Madame Mallory usera de toutes les ruses possibles pour faire plier le patriarche.
C’est ainsi que le petit musulman de Bombay parcourra cent pas pour quitter les cuisines de son père et pénétrer celles de Madame Mallory et ses recettes secrètes, quitter l’Inde sans pourtant la renier.
Beaucoup d’humour dans ce roman, écrit comme une parabole, prêchant la tolérance entre les cultures, le métissage des goûts et des couleurs.
Une histoire qui vous fait saliver, vous enivre d’arômes, à déguster comme une gourmandise permise !
L’adaptation cinématographique est en cours d’écriture.