En 1910, une toile signée de « JR. Boronali, peintre né à Gênes » "Coucher de soleil sur l'Adriatique" fait grand bruit lors de son exposition au salon des Indépendants. En raison du caractère abstrait de cette toile, les critiques sont partagés, certains crient au scandale, d'autres s'enthousiasment, clamant que cette peinture amorçe une nouvelle tendance dans le monde de l'art. Cette oeuvre est vendue aux enchères pour la somme de 400 francs ( soit à peu près 1257 euros actuels).
Mais quelques temps plus tard, l'écrivain Roland Dorgelès révèle que l'artiste se nommait en réalité Lolo et qu'il est l'âne du patron du Lapin Agile, célèbre cabaret de la butte Montmartre, Boronali étant l'anagramme d'Aliboron, l'âne de Jean de La Fontaine. Dorgelès avait eu l'idée d'attacher un pinceau à la queue de cet âne pour lui faire barbouiller une toile !!!
"Dorgelès a voulu tourner en ridicule les artistes sans talent et battre le rappel des valeurs menacées. Il s’agissait de démontrer que le premier venu peut exposer, causant un « préjudice aux œuvres voisines »… D’une part il constate que pour exposer un tableau il suffit de savoir placer dans un cadre, de préférence doré, une toile enduite de couleurs variées : il se trouvera toujours un public pour l’admirer et des critiques pour en discuter les mérites. D’autre part il fait le procès de la consécration des œuvres médiocres par voie d’exposition… »
Il remit la somme acquise par la vente du « coucher de soleil » à l’orphelinat des Arts. Elle fait aujourd'hui partie de la collection permanente exposée à l'espace culturel Paul Bedu à Milly-la-Forêt.