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A Domi-mots

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Toute l'actualité littéraire en quelques lignes, mes goûts, mes découvertes, mes passions.


Adélaïde Bon - La petite fille sur la banquise - Grasset - #LaPetiteFilleSurLaBanquise #NetGalleyFrance

Publié par Domimots sur 21 Mars 2018, 09:50am

Catégories : #Mes lectures, #Grasset, #Version Femina

“Elle ne sait pas que désormais elle est en guerre et que l’armée ennemie est en elle”.

C’est avec beaucoup de tendresse et d’effroi en même temps que j’ai lu le livre d’Adélaïde Bon, ce bouleversant témoignage qui retrace le long et éprouvant combat mené pour une reconstruction après un viol.

C’est à 9 ans que le destin d’Adélaïde a basculé, c’est à 9 ans qu’elle a échoué sur la banquise, seule avec son secret. Elle a mis 20 ans à se reconstruire en livrant un combat acharné contre ce mal pour lequel elle ne trouvait pas de mot et qui la dévorait de l’intérieur, elle le comparera à des méduses qui s’immiscent lentement en elle et qui la dévorent sans que personne ne s’en aperçoivent.

Aujourd’hui, Adélaïde Bon tend la main à toutes les victimes de viol et lance un appel pour que la loi et la prise en charge des victimes changent et évoluent, afin qu’elles ne vivent plus dans une solitude morbide et une honte injustifiée, afin qu’elles soient écoutées et surtout comprises.

Les victimes de violences sexuelles créent souvent une sorte de mémoire traumatique enfouie de l’événement. Elles développent des comportements intimes qui les isolent et souffrent de symptômes dont elles ignorent l’origine. “Plus on a été agressé jeune, plus a de mal à voir le rapport entre la crise de panique au présent et l’agression du passé”.

Désormais,  elle va se couper un peu plus des autres, “sourire, dissimuler, s’épuiser. Passer chaque journée en dehors de soi. Se vivre déportée, sans que nul ne sache”. “Elle rit toujours, peut-être un peu plus qu’avant, c’est qu’elle a le cœur si lourd que quand la joie lui vient, elle s’y jette”.

Elle va meurtrir ce corps qu’elle hait et qui ne lui appartient plus, ignorant  qu’elle est dans le déni total de la violence subie, construisant un bouclier de résistance aux autres et au mal.

“Elle n’a pas idée de ce que ce mot femme, sexualité féminine pourrait signifier, elle une femme dans une civilisation façonnée par les hommes, elle ne connaît sa sexualité qu’à l’aune de la leur”.

Au centre du récit - comme un avant et un après - elle écrit (enfin) le mot VIOL (un mot jusque-là écarté, nié du récit). Elle n’hésite pas à décrire sans ambages ni figures de style les situations insoutenables que subissent les femmes dans les espaces publics par exemple où “les hommes mesurent leur trique à l’effroi qu’ils causent”

C’est un combat qui s’engage, un combat pour la survie, une route longue et périlleuse dont elle ne connaît pas l’issue. Elle rêve seulement d’un mieux, elle cherche du secours parmi les différentes thérapies qui lui sont offertes. Sa plus grande épreuve sera libératrice, quand, assise sur le banc des victimes parmi d’autres victimes, elle croisera avec effroi les yeux de son agresseur. Cette ultime épreuve lui permettra alors d’analyser, de comprendre ce qui lui est arrivé, de se déculpabiliser aux yeux des autres, de partager avec d’autres, d’écrire. “Je suis ce qu’il reste d’une femme après qu’on l’a violée. Et de l’écrire me renoue, me relie, me répare”.

“C’est un livre, quand bien même les sujets dont il parle sont extrêmement douloureux, que j’ai écrit avec beaucoup de douceur et de tendresse, pour toutes les autres petites filles qui sont coincées sur la banquise.” dit-elle. Merci Adélaïde pour ce témoignage bouleversant, merci pour le courage d’avoir mis en mot la douleur lancinante qui a accompagné votre vie durant toutes ces années, merci au nom de toutes les femmes bafouées, agressées et violées qui vivent seules leur souffrance.

 

Ce roman fait partie des coup de cœur des lectrices Femina dont je fais partie. Je gage qu'il sera sélectionné, en tout cas je le recommande fortement.

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R
Un résumé qui donne le ton de cette souffrance. Je vais m'intéresser à ce livre. Merci.
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